vendredi 6 janvier 2017

Nouvelles du Pérou et de Pitunilla (Le Courrier de la Nature, mai-juin 2014)



Le Courrier de la Nature (revue de la Société Nationale de Protection de la Nature) N° 283 (mai-juin 2014) pp: 40-43.


(début)

Dans le N°226 du Courrier de la Nature (mai-juin 2006), j'avais publié avec mon épouse Katia Humala Tasso un article intitulé «Flore et faune d'une vallée de la cordillère des Andes méridionales du Pérou» dans lequel nous présentions le milieu naturel et les cultures des environs de Pitunilla, le domaine agricole et centre de recherches naturalistes où nous vivions depuis 2004.
Huit ans plus tard, une actualisation semble nécessaire; à la fois pour informer de l'état de nos activités et de nos projets, mais surtout parce que la situation dans la région et au Pérou a évolué dramatiquement avec le développement de l'extractivisme comme dans l'ensemble de l'Amérique latine.1
Une grande mine d'or et d'argent à ciel ouvert, Breapampa, appartenant au joint-venture américano-péruvien Newmont-Buenaventura, a démarré en effet son exploitation en 2012 au sommet de la montagne qui domine le village voisin de Chumpi, à quelques kilomètres de Pitunilla.

1Henry Veltmeyer & James Petras: The New Extractivism. A Post-Neoliberal Development Model or Imperialism of the Twenty-First Century? . Zed Books, 2014.

(...)

(fin)

L'animisme et la cosmologie antiques subsistent en effet, cachés et secrets, parmi les Indiens paysans des Andes, hommes de la terre et de la tradition. En vivant sur place parmi eux, on finit par les découvrir peu à peu. Comme par exemple le culte des illya, représentations archétypiques des animaux d'élevage, qu'on enterre cérémonieusement sous certains rochers. Ou celui des apus, les esprits de la montagne. Car ce que nous avons expérimenté, c'est que, dans les Andes, comme en Asie1 et comme vraisemblablement comme dans toute la Préhistoire, la montagne est un espace sacré, celui des morts et des esprits, et symbole de toute sagesse. Les sacrifices humains (capacocha) et les fêtes du retour des Pléiades dans les névés, à plus de 5000 m d'altitude, et les cairns (apachetas) toujours présents sur les cols, en étaient les principales manifestations.
C'est pour cela que l'exploitation minière au sommet des montagnes est pire qu'un crime contre la nature, contre les hommes et contre l'agriculture nourricière, c'est un sacrilège. Car, comme l'Arbre, la montagne cosmique est l'Axis Mundi2

1John Lagerwey, Le continent des esprits – La Chine dans le miroir du taoïsme. Maisonneuve & Larose, 1993.
2Mircea Eliade, Le Sacré et le Profane, Paris, Gallimard, 1956.

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